Le collaborateur d’agence, catalyseur de l’évolution de la relation entre les compagnies d’assurance et leurs réseaux d’agents
Un rôle crucial au sein de l'agence.
Pour un agent général, le rôle de ses collaborateurs est crucial. La plupart du temps, le collaborateur d’agence ne se cantonne pas aux tâches administratives. Tout comme l’agent, il conseille les clients sur les produits, réalise des devis, signe des contrats, gère des sinistres puis accompagne le client jusqu’à son indemnisation. Le collaborateur d’agence est donc souvent un acteur clé, extrêmement polyvalent, même si dans certaines grosses structures l’agent lui assigne parfois un rôle plus spécialisé et cloisonné (gestion du portefeuille, prospection et vente, gestion de sinistres). Depuis 2018, les collaborateurs généralistes sont majoritaires dans les agences, selon une étude menée par l’Agéa.
Par leur connaissance et maîtrise des outils, y compris digitaux, leur connaissance détaillée des produits, ils constituent une extension incontournable pour l’agent, lui permettant d’adresser le champ vaste et complexe, en termes d’offres (IARD et vie), de typologies de clients (particuliers, professionnels, entreprises) qu’il embrasse par son métier de « généraliste ».
Un levier de performance indispensable pour les assureurs.
Salarié de l’agence, le collaborateur n’a de relation hiérarchique directe qu’avec son agent, et la compagnie ne saurait l’animer directement. Pourtant, de par son rôle commercial croissant et l’intensité de ses interactions avec les clients, il est un membre à part entière d’un réseau commercial que toute compagnie d’assurance se doit d’animer et d’accompagner pour atteindre ses objectifs de développement et de qualité de service.
Le réseau constitue le levier principal de distribution des assureurs. Implantés localement et chefs d’entreprises, les agents généraux disposent d’une réputation et d’une relation de confiance avec leurs clients essentielles pour vendre et gérer la relation client sur l’ensemble du cycle de vie du contrat en se différenciant des réseaux concurrents de salariés. L’évolution du statut et de l’importance du collaborateur d’agence créent donc de nouveaux challenges pour les assureurs dans la gestion de la relation à leur réseau.
Les assureurs sont confrontés à 3 enjeux majeurs pour optimiser et pérenniser la performance de leurs réseaux
Animation du réseau : gérer sans ingérence
Quelles ressources une compagnie d’assurance doit-elle allouer à son réseau d’agents généraux pour l’animer et l’aider à faire son métier grâce à des moyens financiers dont chaque agent ne dispose pas à son échelle individuelle ? L’organisation de challenges commerciaux à des échelles économiques et géographiques bien plus grandes que les initiatives individuelles ou collectives de son réseau permettent d’augmenter temporairement les ventes, de renforcer l’engagement et le sentiment d’appartenance à l’entreprise et de témoigner de la reconnaissance face aux succès commerciaux . Ils peuvent être organisés à destination des agents, mais également des collaborateurs d’agence, avec l’aval de l’agent. La compagnie dispose également de leviers et de moyens essentiels permettant de former les collaborateurs sur les nouveaux produits, les nouveaux outils ou sur les évolutions des produits existants via des supports et des ateliers par exemple, des formations en présentiel ou en distanciel. Cela permet aux agents d’obtenir pour eux et leur collaborateur les 15h de formation annuelle obligatoire prévues par la Directive sur la Distribution d’Assurance (DDA).
L’agent étant chef d’entreprise et employeur de ses collaborateurs, la mise à disposition de soutien et d’aide (formation, accompagnements divers) de la compagnie vers les collaborateurs ne peut s’opérer en direct et passe nécessairement par un accord, une consultation et un consensus avec l’agent.
Outils digitaux : capabiliser, pas détourner
L’apparition d’une multitude de process et outils digitaux au sein des compagnies d’assurance (GED, outils de souscription chez le client, outils de déclaration de sinistres…) et des agences (CRM, outils d’aide à la prospection, outils de gestion des agendas…) obligent les collaborateurs à être de plus en plus connectés et à l’aise avec le digital. Ces outils, lorsqu’ils sont bien paramétrés, permettent d’augmenter l’efficacité du collaborateur en automatisant les tâches répétitives sur la partie gestion et prospection, et en évitant la démultiplication des contacts avec le client grâce au self-care. Ces outils ne doivent pas être vus comme une menace pouvant détourner la relation client de l’agence, mais plutôt comme une opportunité de renforcer la relation personnelle avec le client. En effet, en utilisant ces outils pour automatiser certaines tâches, les collaborateurs peuvent consacrer davantage de temps à l'écoute et au conseil personnalisé, ce qui est essentiel pour établir une relation de confiance durable avec les clients.
Ces outils permettent de valoriser les compétences techniques des collaborateurs (expertise sur les caractéristiques des produits, relation à la compagnie dans la gestion des sinistres…) et de mieux les mettre au service des clients parfois perdus face à des parcours de self-care peu clairs ou peu responsifs.
Rétention des talents : un équilibre précaire.
Les perspectives d’évolution pour un collaborateur au sein de son agence sont assez limitées, en particulier dans les petites agences, à moins de s’associer avec l’agent général pour lequel il travaille ou de devenir manager dans les plus grosses structures, sachant que seuls 5% des collaborateurs d’agence en 2019 étaient des cadres (Source : Etude sur l’évolution des métiers de la branche des salariés d’agences générales, Agéa 2019). Ainsi, s’il continue sa carrière dans le giron du même assureur, c’est avec une relation plus directe avec ce dernier : soit comme agent général, soit en intégrant la compagnie d’assurance. L’enjeu pour l’assureur est donc de réussir à capitaliser sur les années d’expérience et de travail et de ne pas laisser les talents filer à la concurrence sur des postes où les profils expérimentés sont très recherchés. Mais là encore, la communication avec l’agent général dans ce processus de recrutement doit se faire en bonne intelligence, voire à l’initiative de ce dernier sentant un bon profil arriver en fin de parcours de son organisation.
Les conséquences de débauchages mal gérés au sein du réseau peuvent s’avérer désastreuses, en déstabilisant l’organisation des garants de la fonction commerciale, et en dégradant fortement la relation avec l’agent concerné.
"We need you" - Les assureurs doivent saisir l'opportunité de valoriser leur réseau comme un pilier de leur stratégie.
La digitalisation du parcours d’achat souscription et de gestion des sinistres suscite la peur pour les agents de voir se développer la vente directe. Cette crainte se chiffre précisément, ainsi la part des sociétés avec intermédiaires (courtiers et agents) décroit depuis plus de 30 ans, puisque leur part de marché en pourcentage des ventes est passée de 64% en 1991 à 54,8% en 2010 et 52% en 2019 (Source : Chiffres clés FFA repris par Atlas Mag).
Dans le même temps les agents généraux peuvent percevoir les initiatives de leur compagnie comme une forme d'ingérence venant entraver leurs prérogatives entrepreneuriales. Dans ce contexte, il appartient donc aux assureurs de démontrer que leurs actions sont précisément destinées à accompagner leurs agents car ces derniers jouent un rôle crucial en matière de distribution et de relation client.
Sources
https://www.atlas-mag.net/article/la-distribution-des-produits-d-assurance-en-france